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À la recherche du web perdu

Publié le 8 mars 2025

À la recherche du web perdu

Je me rappelle avoir envoyé mon premier e-mail en 1996, lors d’un stage en entreprise. C’était mon premier contact avec internet, et déjà, l’idée de pouvoir échanger si facilement des messages avec quelqu’un, où qu’il soit sur la planète, me paraissait extraordinaire. Un simple clic, et mon texte pouvait franchir des milliers de kilomètres en quelques secondes, comme par magie.

Mais ce n’est que quelques années plus tard, en découvrant un autre visage d’internet, le web, que tout a changé. Ce fut une révélation. J’étais émerveillé par ce nouveau monde numérique, sans frontière, et j’y ai tout de suite perçu une source intarissable d’enrichissement et de partage.

Dès mes premières connexions à internet — à des tarifs indécents et une vitesse qu’on aurait du mal à imaginer aujourd’hui — j’ai été happé par le web, son potentiel et ses promesses. Malgré la relative pauvreté des contenus de l’époque, j’adorais me balader sur la toile, j’étais captivé par la richesse de ce que je pouvais découvrir de clic en clic.

Grâce au web, j’ai réveillé en moi des passions qui s'étaient légèrement assoupies avec le temps. J'ai découvert les communautés en ligne : peu importe tes centres d’intérêt, qu’ils soient populaires ou ultra-niche, il existait, quelque part sur le web, un forum ou un newsgroup sur lequel échanger avec d’autres passionnés. On y découvrait aussi pléthore de petits sites personnels, façonnés à la main avec amour par des anonymes, simplement animés par l’envie de partager leur passion et leur savoir.

D’abord, le web a déclenché en moi une soif de découverte. Puis, très vite, l’envie de créer à mon tour a pris le dessus. Avec internet, et une certaine innocence de jeune adulte à peine sorti de l’adolescence, tout semblait possible.

J’étais déjà relativement à l’aise avec l’informatique, et nul doute que cela m’a aidé lorsque j’ai appris les rudiments du HTML et du CSS (d’abord à la dure dans Notepad, puis rapidement assisté de logiciels tels que Microsoft FrontPage puis Macromedia Dreamweaver). J’ai aussi découvert comment héberger un site (coucou Multimania) via un client FTP.

Je me suis inscrit sur des forums, j’ai échangé et pris part à des discussions autour de mes passions : le graphisme, le rétrogaming et la découverte des émulateurs, mais aussi la musique, la photographie… Chaque forum et chaque site perso était une porte ouverte sur un univers spécifique, animé par des passionnés qui prenaient le temps d’expliquer, d’aider, et de transmettre leur savoir. C’était un web où l’on cherchait, où l’on explorait, et où l’on construisait des liens autour d’intérêts communs.

J’ai publié mon premier site web en 1999, puis un autre, et encore un autre… Des petits sites de quelques pages, que je ne mettais que rarement à jour, mais qui me permettaient d’expérimenter, de tester et d’apprendre.

Et puis, vers 2003 ou 2004, j’ai découvert les blogs et Dotclear. J’ai lancé mon premier blog, et, pendant quelques années, je me rappelle avoir fait partie d’une petite communauté de blogueurs francophones, avec qui j’échangeais régulièrement via les commentaires de nos blogs respectifs. Ces échanges donnaient une vraie dimension sociale au web, une impression de conversations sincères, sans la précipitation ni l’éphémère des réseaux sociaux qui viendraient plus tard.

Le temps passait. Je continuais à apprendre, échanger, partager et découvrir de nouveaux sites web, de nouvelles façon de créer. J’ai fini par abandonner mes premiers blogs, puis j’ai découvert WordPress, avec lequel j’en ai ouvert de nouveaux, pour moi, ainsi que pour des proches. Mais à chaque fois, inévitablement, je les ai délaissés, puis laissés mourir. Par manque de temps, probablement d’envie et de motivation, cette fameuse question « À quoi bon ? » que j’ai la fâcheuse tendance à trop souvent me poser, encore aujourd’hui.

Depuis ce temps, le web a évolué et a changé drastiquement, en bien comme en mal. Je pense qu’une réelle fracture s’est formée entre le web d’avant et le web actuel à la fin des années 2000, avec l’apparition et la démocratisation des smartphones et des réseaux sociaux. À partir de ce moment-là, le web a pris une toute autre tournure, avec ses bons mais surtout ses mauvais côtés.

Même si je me suis adapté et que j’ai adopté le web d’aujourd’hui, je continue à explorer, découvrir, m'émerveiller, bidouiller, créer, parfois partager. Je participe toujours activement sur un forum, à l’ancienne, avec les mêmes membres depuis 2003.

Mon parcours m’a mené à travailler dans l’univers du web, où je jongle notamment avec le contenu, le design et la technique — même si l’émerveillement n’est plus vraiment de mise.


C’est en partie avec cette image d’un web révolu, que j’affectionne tant, qu’est née l’idée de repenser totalement mon site, Cafélog, pour en faire une petite capsule temporelle, hommage au web de la fin des années 90 et de la première moitié des années 2000.

Après des années passées sur WordPress, à le maintenir ainsi que ses plugins et thèmes, à le bidouiller sans vraiment le maîtriser, à gérer la lourdeur de sa base de données et à jongler avec divers outils d'analyse et d'optimisation, j’ai ressenti le besoin de retrouver un site web plus simple, plus maîtrisé, loin des usines à gaz et des solutions clés en main.

J’y reviendrai dans un prochain article, où j’expliquerai pourquoi et comment j’ai refait mon site web entièrement à la main, avec un éditeur de code, ainsi que le workflow que j’ai mis en place.

Revenir au code brut, sans intermédiaire, c’est renouer avec l’essence même du web tel que je l’ai découvert à la fin des années 90 : un espace d’expérimentation, de liberté et de créativité. Cette migration est bien plus qu’un simple changement technique ; c’est une manière de me réapproprier mon espace numérique et de le façonner selon ma vision et mes besoins.


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